C’est quoi ?
Le codéveloppement est une méthode d’apprentissage expérientielle entre pairs qui s’appuie sur un processusen 8 étapes cadrées.

Selon ses créateurs québécois, Payette et Champagne :
« Le groupe de codéveloppement professionnel est une approche de développement pour des personnes qui  croient pouvoir apprendre les unes des autres afin d’améliorer leur pratique.

La réflexion effectuée, individuellement et en groupe, est favorisée par un exercice structuré de consultation qui porte sur des problématiques vécues actuellement par les participants… »  (1997).
A la fois méthode, processus et stratégie réflexive, le codéveloppement vise à améliorer sa pratique professionnelle, développer son savoir-agir et renforcer son efficacité grâce aux échanges cadrés et partages d’expériences entre pairs exerçant la même fonction.

Elle permet une approche plus concrète grâce aux retours d’expériences terrain et une prise de recul par rapport aux problématiques rencontrées dans le milieu professionnel.
Cette méthode favorise ainsi l’émergence de l’intelligence collective.

Enjeux et usages à l’origine
Mise au point dans les années 90 par Adrien Payette, philosophe de formation qui enseigne en gestion et Claude Champagne, psychologue ayant exercé dans le développement des Ressources Humaines, cette approche met en lumière le potentiel d’apprentissage des échanges entre pairs.
Dans leurs expériences respectives, chacun des deux hommes va d’abord initier individuellement cette technique qui n’est pas encore aboutie ni harmonisée.
C’est seulement en 1994 que les deux formateurs se rencontrent puis développent une approche d’autoformation ou d’auto-perfectionnement qui ne deviendra que bien plus tard le Groupe de Codéveloppement.
Leur volonté étant de rendre cette méthode adaptable et généralisable à des milieux professionnels variés.
Payette et Champagne s’inspirent de la maïeutique de Socrate ainsi que de Lewin (philosophe) pour son approche de la « dynamique de groupe » et la « recherche-action ».
Ils s’appuient également sur des apports théoriques comme l’action learning (Revans, 1982), la praxéologie (St Arnaud, 1992, 2003), les communautés de pratiques (Wenger, 1998), le praticien réflexif (Schön, 1983) et enfin sur le modèle d’apprentissage expérientiel
de Kolb (1984).

Usages pédagogiques
Le codéveloppement peut être utilisé en praxéologie, en analyses de pratiques ou bien dans le cadre d’un Rex (Retour d’expériences) par exemple.
De plus, cette approche permet d’adopter des postures différentes (accompagnement, facilitation) selon le rôle adopté pendant la séance en développant des compétences importantes qui ne sauraient être aborder en cours :

  • Développer l’entraide
  • Apprendre à se questionner
  • Partage de savoirs pratiques
  • Prendre du recul par rapport à une situation problématique
  • Mener une réflexion collective en vue d’une résolution de situation problématique
  • Rompre avec l’isolement

En bref, une technique aux nombreuses vertus et un socle pour étayer son identité professionnelle.

Intérêt pédagogique
Dans la lignée des apprentissages par l’expérience de Kolb, la méthode se base sur des cas pratiques et concrets.
Le codéveloppement apparait donc comme complémentaire aux apports théoriques des enseignements classiques.
Pour l’alternant, ces rencontres valorisent l’expérience acquise en entreprise.
Les interactions entre les participants permettent une amélioration des pratiques professionnelles.
Ainsi cette réflexion collective nourrit la réflexion individuelle. Cette méthode bien que cadrée reste adaptable en temps et peut être pratiquée à distance.
Elle intervient dans différentes dimensions à la fois dans un cadre professionnel entre pairs (Analyse de pratiques) en formation intra, entre enseignants et/ou formateurs ou encore entre apprenants dans le cadre d’un REX par exemple.
Ici les participants partent de l’expérience pour construire un savoir qui servira l’action à venir.

La Méthode
Le groupe de codéveloppement réunit 5 à 10 personnes maximum ayant une activité professionnelle et des responsabilités comparables (niveau hiérarchique égal) mais qui ne sont pas forcément de la même organisation.

L’objectif est de traiter l’un des 3P (Projet, Préoccupation ou Problématique) choisi par l’ensemble du groupe en vue d’une amélioration de sa pratique professionnelle.
De là va se mettre en place une série de 8 étapes qui permettra une prise de recul par rapport à la situation choisie et un effet miroir pour les consultants.
La séance se déroule sur une durée de 1h à 1h30 selon les questions.
Les participants endossent des rôles différents interchangeables selon les séances :
Le facilitateur ou animateur est garant du bon déroulement de la séance (gestion du temps de paroles, respect des étapes, durée…).
Il peut également être consultant de la séance.
L’exposant est celui dont le sujet sera traité lors de la séance.
Les consultants sont tous les autres membres du groupe qui questionneront, qui éclaireront l’exposant de leur vécu et proposeront solutions ou conseils.
Le groupe se base sur la confiance et induit une confidentialité et le respect des échanges.
Idéalement, les rencontres sont mensuelles.

Déroulement, consignes :
Chaque étape est importante mais sa durée est adaptable selon le contexte et la modalité (présentiel ou distanciel)

Etape 1 : Exposé des différentes situations professionnelles des participants à savoir l’un des 3P (Projet, Préoccupation ou Problématique) et sélection de l’une d’elles. (15 min)

Etape 2 : Clarification de la situation choisie. Les consultants posent des questions au client (15 min)

Etape 3 : Contrat/ Reformulation de la demande par le client. Il précise en quoi et comment les consultants peuvent l’aider (5 min)

Etape 4 : Consultation : Analyse de la situation, conseils ou suggestions par les consultants (25 min)

Etape 5 : Synthèse des éléments récoltés (2 min)

Etape 6 : Plan d’actions mis en place par le client (5 min)

Etape 7 : Retour sur le vécu et bilan du groupe sur les apprentissages (10 min)

Etape 8 : Retour sur les engagements pris lors de la séance précédente. (10 min)

Freins, point de vigilance
Cette méthode requiert l’adhésion des participants et un certain degré d’implication.
Le succès dépend de la régularité des échanges (une rencontre mensuelle a minima), de la qualité de présence des participants ainsi que d’une capacité à prendre du recul.
L’exercice peut s’avérer répétitif.

Pour aller plus loin :
Boucenna, S., Charlier, E., & Donnay, J. (2007). Le codéveloppement par les pairs : Une stratégie de réflexivité au service de l’évaluation et du conseil.
Les Dossiers Des Sciences De L’Éducation, 18(1), 51-61.

Payette, A., Champagne, C. (1997). Le groupe de codéveloppement professionnel. Presses de l’Université du Québec.

Vandercleyen, F., L’Hostie, M. et Dumoulin, M.-J. (dir.). (2019). Le groupe de codéveloppement professionnel pour former à l’accompagnement des stagiaires.
Conditions, enjeux et perspectives. Presses de l’Université du Québec. Revue Des Sciences De L’éducation, 45(3), 170-171.