AFEST (Action de Formation en Situation de Travail)
C’est quoi
L’AFEST s’inscrit dans la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel qui acte que l’action de formation peut être réalisée en situation de travail. Il s’agit de transformer l’expérience du travail en compétences (apprentissage par le faire).
Le dispositif AFEST reconnait la situation de travail comme lieu d’apprentissage à part entière et de ce fait, réinterroge les pratiques et les objectifs de la formation et la notion même d’apprentissage (qu’est-ce qu’apprendre?).
La mise en œuvre d’une AFEST nécessite l’identification de situations de travail répondant aux objectifs professionnels visés et un accompagnement de l’apprenant dans sa réflexion sur son action et son activité. L’AFEST doit donc s’articuler autour de 2 séquences :
- une situation de travail préparée, organisée et aménagée (qui doit pouvoir permettre le droit à l’essai, au tâtonnement)
- une séquence réflexive au cours de laquelle on s’extrait de l’activité de travail pour regarder ce qui s’est passé et donner du sens à l’action
Enjeux et usages à l’origine
Plusieurs enjeux peuvent être identifiés :
Introduire de la formation dans le travail. Avec l’AFEST, la situation de travail n’est plus le moyen de mettre en application les savoirs acquis en formation mais devient l’outil, le support de formation.
Rendre la formation plus accessible notamment pour les salariés des TPE-PME (salariés souvent les moins qualifiés et qui ont peu accès à la formation) en rendant les organisations plus apprenantes.
Formaliser les situations d’apprentissage « sur le tas ». L’AFEST permet de « reconnaître l’aptitude d’un salarié à transmettre et à apprendre tout le temps quel que soit son âge et son statut » explique Pierre Possémé (Président du FPSPP, 2018). Il insiste aussi sur « la capacité de l’entreprise à transmettre, former et valoriser les savoir-faire et savoir-être des salariés ».
Usages pédagogiques
L’AFEST est une modalité pédagogique pouvant s’articuler avec d’autres modalités (en présentiel et/ou à distance) dans le cadre d’un parcours de formation hybride. Comme le précise Béatrice Delay, Conseillère Technique au Cnefop, « la vocation de l’Afest n’est pas de se substituer aux autres modalités de formation mais de les enrichir, y compris dans le cadre de dispositifs hybrides ».
Cette nouvelle modalité de formation n’a pas vocation à remplacer les actions de formation externes mais à enrichir la palette des solutions existantes
Déroulement, consignes, exemples
L’ingénierie en amont constitue une étape clé de la mise en œuvre et de la réussite d’une AFEST.
La 1ère phase de cette ingénierie consiste à établir un diagnostic d’opportunité : s’agit-il du meilleur format au vue de l’objectif visé.
Ensuite, on établira un diagnostic de faisabilité : est-ce que les conditions de mise en place et de réussite sont réunies ?
Lors de la phase suivante, il faudra identifier les compétences visées par la formation : de quelles compétences dispose le bénéficiaire et quelles compétences à acquérir ?
Ensuite il s’agira d’identifier et d’analyser la situation de travail adéquate en fonction des compétences visées : est-ce que la situation de travail est aménageable pour en faire une situation de formation ? Il s’agira ici de « se doter d’une culture de l’analyse du travail » (Patricia Remoussard, 2017) et « savoir identifier dans le travail les moments qui peuvent être source d’apprentissage » (Anne-Lise Ulmann, 2017).
On va enfin définir le déroulé pédagogique (étapes, moyens et modalités) et choisir les formateurs AFEST.
En guise d’illustration, on peut citer l’expérimentation menée par AGEFOS-PME auprès de deux entreprises, dans le cadre du plan de relance de l’alternance Vision Pro (Sarah Macler, 2018).
Intérêt pédagogique
L’intérêt pédagogique de l’AFEST est de transformer l’expérience du travail en compétences. Elle permet l’acquisition de compétences spécifiques et pertinentes au regard de celles requises dans l’exercice de l’activité. Pour les entreprises, l’AFEST peut ouvrir un chemin vers des organisations plus apprenantes.
Elle montre sa pertinence en particulier pour des compétences non disponibles immédiatement sur le marché du travail ou pour des compétences que les formations plus « classiques » ne permettent pas de développer.
Les entreprises apprécient l’opérationnalité de cette modalité et les salariés bénéficiaires son utilité immédiate dans leur travail ainsi qu’une forme d’apprentissage non scolaire. Ces derniers soulignent également l’effet positif sur la confiance en soi.
Pour les formateurs AFEST, l’effet positif se situe du côté de l’enrichissement de leur expertise. Elle les amène à interroger leurs propres pratiques et à développer leurs compétences pédagogiques. Les formateurs y voient également une reconnaissance de leurs compétences.
Mise en garde
L’action de formation en situation de travail (AFEST) ne se réduit pas à un apprentissage « sur le tas ». Sa mise en œuvre relève d’une ingénierie précise, et son efficacité implique que plusieurs conditions soient réunies.
Tout d’abord, le choix de la situation de travail est crucial. Les situations seront d’autant plus apprenantes qu’elles seront riches et variées, fréquentes et dans une logique de complexité croissante.
Pour réussir, une AFEST doit être basée sur un consentement et une volonté mutuels de la direction, de l’apprenant et du formateur.
De plus, le choix des formateurs AFEST doit répondre à plusieurs critères : le volontariat, l’expertise, l’appétence pédagogique et le positionnement à l’égard du formé (il est préférable qu’ils ne soient pas liés hiérarchiquement).
La séquence réflexive est nécessaire pour qu’une action de formation puisse être qualifiée d’AFEST. L’importance de cette étape de réflexivité dans le processus rend primordial l’accompagnement préalable du formateur à la démarche.
Apprendre implique d’avoir le droit à l’erreur et à l’hésitation et donc de sécuriser ce droit dans l’aménagement de la situation de travail.
Il est également important de prendre en compte les contraintes organisationnelles (le choix du moment par exemple) sans pénaliser le client final et sans prendre de risque pour l’entreprise.
Pour aller plus loin (bibliographie, webographie)
Yvon Minvielle, Sociologue Professeur d’université
ADISSEO, Grand Prix Digital Learning Excellence Awards 2018, juin 2018
Macler, S.2018. « Regards sur une expérimentation AFEST. Quelques formes d’apprentissage par l’expérience du travail ». Education permanente. N°216, p.99-109.
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