Entre inégalités et solidarités, comment les élèves en formation se sont-ils adaptés à la crise sanitaire ?

Et si on donnait la parole aux élèves ? Comment ont-ils vécu le passage des formations de présentiel en distanciel ? Un enseignant du Cnam a interrogé une vingtaine d’élèves de la licence Commerce, Vente et Marketing (CVM) sur la manière dont ils vivaient l’enseignement à distance. Il en ressort des points de vue différenciés en fonction de leur compétence d’utilisation du numérique, du matériel et des réseaux dont ils disposent, mais aussi de leur manière d’apprendre. Paroles d’élèves recueillies alors qu’ils étaient encore confinés.

Des inégalités d’accès au numérique

Les élèves ne sont pas égaux dans leur accès aux réseaux d’Internet. Ils sont nombreux dans ce cours à témoigner des « galères » d’accès aux ressources ou aux classes virtuelles en raison de leur faible réseau :

« J’avais une connexion parfois lente, la Box a pu avoir des soucis, ça avait un impact sur les pages de chargement notamment des vidéos ».

« La connexion Wi-Fi est de plus en plus faible. Parfois mon compte se déconnecte ou bien je n’entends plus les professeurs… ».

« Pas de soucis, sauf la connexion Free qui est au niveau de son prix, très basse… ».

Des aléas techniques ou un déficit de compétences numériques

De surcroit, le réseau des élèves est parfois partagé avec d’autres membres de la famille. Même si nous avons pu voir au travers du témoignage de certains enseignants qu’il existe des solidarités entre élèves, voire entre élèves et enseignants, il n’en reste pas moins que suivre des cours à distance demande des compétences techniques et du matériel adapté.

« Ma caméra ne fonctionne pas, la batterie de mon PC se décharge très vite et peut donc s’éteindre pendant le cours ».

« Mon micro ne fonctionne pas, j’ai essayé dans les réglages mais je n’arrive pas à le faire fonctionner. Avec un casque j’avais réussis la dernière fois sur Teams mais ce matin lors de mon oral, impossible de le faire fonctionner, c’est un peu pénible ».

Parfois, c’est donc aussi leur capacité technique à s’approprier les outils qui fait défaut.

Des adaptations et des solidarités

Alors les élèves s’adaptent et s’entraident. Ce qui frappe dans le retour de cette classe d’élèves, c’est la diversité des outils utilisés pour communiquer entre eux : Big Blue Button bien sûr pour les cours, mais aussi, Teams, Google Meet ou même Messenger… Parfois ils mixaient :

« Quand un outil ne fonctionnait plus, on passait à un autre ».

« On se passait de l’information entre nous sur ce qui fonctionnait le mieux ».

A noter aussi que le Forum est souvent apparu peu adapté aux élèves car faisant doublon avec les dispositifs de chat déjà mis à disposition dans ces outils.

Sans doute les services numériques sont-ils mieux dimensionnés aujourd’hui qu’au moment de cette enquête et ces aléas sont en partie résolus.

Des classes virtuelles pour maintenir le lien

Les scénarios pédagogiques proposés par les équipes du Cnam ont porté leur fruit pour cette formation. La plupart des enseignants mettaient en œuvre un déroulé alternant différentes modalités pédagogiques.

« Je trouve qu’il est important de faire un peu de tout, pour ma part c’est ce qui me permet de bien comprendre les cours et de rester concentrée. Selon moi un live de 3h30 n’est pas le mieux car il ne retiendra pas l’attention de tout le monde ».

Les classes virtuelles constituaient un temps collectif très apprécié.

« Je trouve que la classe virtuelle est importante pour garder le contact avec les enseignants. Même 30 minutes pour conclure ou introduire un cours ».

« Les classes virtuelles sont bien aussi, même si tout le monde ne fait pas l’effort de participer cela permet de garder du lien ».

« C’est très important les classes virtuelles, pour garder avoir des informations ».

La question des examens suscitait à l’époque beaucoup d’inquiétude et les temps de classe virtuelle pouvaient constituer un lieu de réassurance.

Des travaux de groupe à réguler

Le passage au distanciel a amené les enseignants à augmenter les travaux individuels et les exercices ou TD en sous-groupe. Les élèves font le récit d’expérience différenciées selon la composition du groupe. Pour certains le travail en sous-groupe un lieu de soutien et d’entraide :

« Les travaux collectifs sont supers à réaliser, cela permet d’échanger entre nous. C’est ce qu’il y a de plus instructif : apprendre en faisant, notamment lorsque l’on peut choisir ses partenaires de groupe avec qui on est sûr que tout le monde travaille au même niveau ! »

On retiendra cette condition de l’engagement collectif dans le travail pour qu’un groupe soit soutien. Sous-entendu, travailler en petits groupes nécessite des compétences communicationnelles.

Ce qui fait que d’autres élèves sont moins enthousiastes :

« Ce qui me convient le moins, c’est les travaux de groupe. En effet, on aurait tendance à penser que cela est plus facile, mais ce n’est pas le cas ».

« Travailler en groupe à distance est difficile, même avec tous les moyens numériques qui existent c’est beaucoup plus long de se mettre d’accord, d’avancer, etc. ».

« Nous n’avons pas souvent de retours oraux sur les travaux rendus, ça nous donne un peu l’impression de travailler dans le vide c’est assez dommage sur ce point ».

Outre la question des compétences à travailler en groupe, se pose celle de l’utilisation de ces travaux dans le déroulé pédagogique.

Au final, des opinions différenciées sur l’apprentissage à distance

Il est prématuré d’évaluer comment le plan de continuité pédagogique a été vécu par les élèves. Il faudra attendre d’autres enquêtes, et notamment les enquêtes quantitatives réalisées par l’Observatoire des Etudes et Carrières du Cnam pour objectiver ce premier ressenti.

Outre les avantages déjà connus de la Formation à distance, à savoir les gains de temps de déplacement et une plus grande souplesse dans l’organisation personnelle, certains élèves se déclarent plus à l’aise dans cette modalité d’apprentissage :

« Je trouve que nous sommes plus efficaces à distance car nous devons rester focus sur le cours pour ne rien manquer ».

D’autres, à l’inverse, estiment qu’il est plus difficile de se concentrer, d’apprendre :

« C’est difficile de suivre les cours à distance, être en présentiel en cours permet d’être plus attentif »,

« Les cours à distance sont efficaces mais beaucoup moins qu’en classe réelle »,

« Le côté humain manque quand même ».

On le sait les élèves n’apprennent pas tous de la même manière. Pendant la crise sanitaire, certains ont découvert une autre façon de travailler, d’autres ont perdu un soutien social nécessaire à leurs apprentissages. Un argument supplémentaire pour encourager l’hybridation des formations ?

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